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Portraits de l’Exil
Paris-New York (1933-1942)
Musée du Montparnasse
- Hannah Arendt
- Crédits : Fred Stein
Exposition des photos de Fred Stein au musée du Montparnasse
Paris, du 3 au 26 novembre 2011
Le photographe Fred Stein (1909-1967), lui même exilé aux Etats Unis, a réalisé entre 1933 et 1967 une série de portraits de grands intellectuels juifs allemands, philosophes, savants, artistes et hommes politiques, exilés aux Etats Unis, essentiellement à New York, à partir de 1933. On lui doit notamment des portraits, très célèbres ou encore inconnus, de Hannah Arendt, Bloch, Brecht, Buber, Chagal, Einstein, Ernst, Horkheimer ou Thomas Mann.
Son fils, Peter Stein, qui enseigne les médias à New York University, vient de mettre au jour l’ensemble de ces photographies : l’émotion qui s’en dégage n’a d’équivalent que la réflexion qu’elles rendent possible sur un moment-clef de l’histoire intellectuelle du monde contemporain, moment lié à l’exil et à la transplantation d’une langue et d’une culture à une autre.
Redécouverte d’un photographe - pour la première fois exposé dans un musée français - que rien ne prédisposait à cette étrange destinée.
Cette exposition présente les portraits d’une centaine d’intellectuels, d’artistes, de scientifiques, d’hommes politiques ayant vécu pour la plupart un double exil entre 1933 et 1942 : contraints à l’exode, ils ont d’abord fui l’Allemagne nazie, puis la France de Vichy et l’Europe en guerre.
Des clichés réalisés par un homme lui-même victime et témoin de ces départs forcés, et qui a découvert la photographie à Paris. Ou plutôt que la photographie a choisi : ayant reçu comme cadeau de mariage un Leica en 1933, Fred Stein s’est mis à arpenter tous les quartiers de Paris pour devenir un reporter des rues. « Le Leica m’a enseigné la photographie », disait-il.
Cet ami de Robert Capa et de Gerda Taro - qu’il est le seul à avoir immortalisés ensemble à la terrasse d’un café - a exposé aux côtés des plus grands photographes d’avant-garde : Brassaï, Cartier-Bresson, Man Ray, Dora Maar, André Kertész... dans la célèbre galerie de la Pléiade en 1935-1937.
Fred Stein fréquentait le milieu des réfugiés et celui de l’intelligentsia française, qui combattaient pour la dignité, la liberté de penser, la liberté de créer. Ses premiers portraits sont ceux d’André Malraux, de Willy Brandt, d’Arthur Koestler... Il en réalisera ensuite plus d’un millier à Paris et à New York, quasiment inédits en France jusqu’à aujourd’hui.
Son oeuvre est un magnifique témoignage non seulement de la vie intellectuelle pendant les années sombres de l’avant-guerre à Paris, mais également de la migration des plus grands esprits vers l’Amérique, de la force de l’histoire et de la résistance humaine.
Voici enfin l’occasion de découvrir la vie étonnante et ignorée d’un photographe aussi érudit qu’humaniste, et les secrets de son métier. Fred Stein portait un réel intérêt à ses modèles, aussi curieux d’engager de longues discussions avec eux que de les saisir, avec son appareil, à la seconde où ils se détendaient et, oubliant l’objectif, se révélaient. D’où ces clichés d’un grand naturel et d’une qualité remarquable.
100 portraits de l’exil
Fred Stein obtient son diplôme de droit au moment où Hitler devient chancelier (1933) et sa carrière s’arrête immédiatement. Contraint de fuir les persécutions politiques et raciales de l’état nazi, prétextant un voyage de noces, Stein débarque à Paris avec sa jeune épouse. Là, ils s’offrent comme cadeau de mariage un Leica (le premier 35 mm). C’est, dit-il, l’appareil qui lui enseigna la photographie. Stein en est un des pionniers avec Cartier-Bresson.
A Paris, il fréquente les milieux des réfugiés mais aussi de l’intelligentsia française qui combattent pour la dignité humaine, la liberté de penser et de l’art. Ses premiers portraits sont ceux d’André Malraux, Arthur Koestler, Willy Brandt, Berthold Brecht, Robert Capa et sa compagne Gerda Taro (Stein est d’ailleurs le seul à avoir pris une photo de ce couple mythique, souriant à la terrasse d’un café - des photos retrouvées récemment dans la « valise mexicaine » perdue depuis 1939.
Il doit de nouveau fuir en 1940 - après avoir passé quelques mois dans un camp. Convoqué au stade de Colombes en septembre 1939, il est envoyé dans le camp de Villebon (Loir et Cher) où il retrouve Heinrich Blichert, le futur mari d’Hanah Arendt, et Erich Cohn-Bendit (le père de Daniel). Presque tous sont livrés aux nazis. Sein et quelques-uns de ses compagnons s’enfuient au moment de la débâcle. Il retrouve son épouse Lilo à Toulouse. Elle a traversé toute la France avec une valise pleine de négatifs. Ils gagnent Marseille où ils sont adés par Varian Fry (Comité de secours américain) pour quitter l’Europe.
Ils embarquent sur le Winnipeg le 7 mai 1941 en compagnie de 700 réfugiés dont des photographes célèbres, Ise Bing, Ylla, Breitenbach. Direction La Martinique. Le cargo - le « bateau de l’espérance » qui avait transporté deux mille républicains espagnols au Chili en 1939 grâce à l’aide de Pablo Neruda - est arraisonné aux abords de l’île française par un navire hollandais et détourné vers Trinidad. Motif : les alliés arrêtent tous les bâtiments battant pavillon français (la France de Vichy). Stein arrive enfin à New York fin juin 1941. C’est le début d’une nouvelle vie, faite de rencontres, d’amitiés et de portraits !
Le fonds comporte des milliers de portraits, parmi lesquels : Gide, Matisse, Romain Rolland, Tzara, Paul Vaillant-Couturier, Vercors, Arp, Galder, Dali, Paul Langevin, Paul Rivet, Günter Grass, A. Huxley, A. Milet, Nabokov, Neruda, Anaïs Nin, Pasternak, Singer, Steinbeck, Updike, Darius Milhaud, Joan Crawford, André Kertéoz...
Le site du Musée du Montparnasse