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Dernière modification : 22 mars 2018

Nausicaa Elena MILANI

République des Savoirs

Post-doctorat labex TrnsferS : mai 2015 à janvier 2016
Programme Fernand Braudel IFER - incoming

 

La Censure de la Réponse faite par M. Régis au livre intitulé : Censura philosophiæ Cartesianæ par Pierre-Daniel Huet
[BnF, MF 14703]

En 1691, un an après la publication de la première édition du Système de philosophie, contenant la logique, la métaphysique, la physique et la morale (Paris, 1690) et l’année où le même ouvrage fut publié par Huguetan à Amsterdam, Régis répondit à la Censura philosophiae Cartesianae (Paris, 1689) de Huet avec la Réponse au livre qui a pour titre « P. D Huetii Censura philosophiae cartesianae » (Paris, 1691). Selon Bayle, la Réponse doit être considérée comme un exemple pour tous ceux qui à l’avenir voudront servir la même cause (Bernard le Bovier de Fontenelle, Éloges des Academiciens, in Œuvres de Fontenelle, vol. 1, Paris, Salmon-Peytieux 1829, p. 145).

La force de l’attaque menée par Huet contre la philosophie cartésienne justifie la propagation de la Censura bien au-delà des frontières françaises. En France, la réfutation principale fut la Réponse (1691) de Pierre-Sylvain Régis, qui à son tour suscita une nouvelle attaque de Huet. Il est remarquable que Régis se considère comme « obligé d’y repondre » et qu’il publie sa réponse précisément en 1691, l’année même où, alors que la censure se resserrait, il avait publié une nouvelle édition de son œuvre majeure aux Pays-Bas. L’objectif de Régis est de défendre non seulement Descartes mais aussi les cartésiens.

La réponse de Régis à la critique de l’Évêque de Soissons est organisée de manière très claire et rigoureuse, en évoquant les articles proposés et en répondant point par point à chacun d’eux, comme s’il s’agissait d’une véritable disputatio.

La réponse de Huet à Régis en 1694 a pris la forme d’une édition largement augmentée de la Censura, qui a remplacé pour le public Censure de la réponse faite par M. Régis au livre intitulé Censura philosophiæ cartesianæ (BnF, MF 14703.). Les Nouveaux mémoires pour servir à l’histoire du cartésianisme (s.n. 1692) suivent la même direction : écrit par Huet entre 1691 et 1692, peu de temps après la publication de la Réponse de Régis, ce travail est dédié à ce dernier en qualité de « Prince des philosophes cartesiens » et se caractérise par un ton ironique et sarcastique, visant à ridiculiser plutôt qu’à réfuter la philosophie cartésienne. Le compte rendu de la Censura, publié dans le Journal des sçavans (Journal des sçavans du 6, du 13 et du 20 juin 1689, pp. 247-52, pp. 253-9, pp. 265-71), affirme que le travail de Huet vise à détruire le fondement de la philosophie cartésienne, et que sa ruine « entraîne necessairement celle de tout ce grand édifice qui par sa structure specieuse a fait l’admiration » (Journal des sçavans du 6 juin 1689, p. 247.) du XVIIe siècle.

Le but de mon projet de post-doctorat est de publier une édition critique de Censure de Huet à la réponse de Régis, qui représente une contribution importante non seulement pour l’histoire des idées en général et pour l’histoire du cartésianisme en particulier, mais aussi pour l’étude des controverses philosophiques à l’époque moderne.

La Censure sera publiée dans sa langue originale, l’introduction et les notes critiques en français. L’introduction se concentrera principalement sur le débat Régis-Huet : elle le replacera dans son contexte historique et philosophique, soulignera les phases du débat et les différentes attitudes de ses protagonistes et montrera que cette controverse peut être considérée comme une pierre angulaire dans l’histoire de la philosophie cartésienne.

Mon but est de mettre en évidence que l’échange Régis-Huet donne la parole non seulement aux premiers disciples, mais aux détracteurs de la philosophie cartésienne, ce qui permet de comprendre comment la philosophie cartésienne a été constituée, modifiée et commentée non seulement par ses partisans, mais aussi par ses adversaires. De plus, je vise à mettre en évidence l’histoire matérielle du manuscrit, dont la structure et l’écriture révèlent, dans le processus d’écriture de l’auteur, une tension latente entre véhémence et méditation. La Censure suit le même schéma de la Censura : elle réfute point par point la Réponse de Régis et fait explicitement référence aux textes de Descartes en ce qui concerne les passages qui Huet juge problématiques en raison de l’absence de fondement, de l’incohérence des théories présentées et de leur complexité religieuse et philosophique.

L’appareil critique vise à faire la collation du manuscrit et à tracer l’analyse diachronique des arguments de Huet dans la tradition : il mettra en évidence les sources explicites et implicites du texte, il reviendra aux passages supprimés ou ajustés, il permettra de clarifier les arguments de l’auteur à travers une enquête du matériel qu’il soit publié ou inédit. Enfin, il sera utile de déterminer si et dans quelle mesure Huet développe dans ses Mémoires les arguments exprimés dans la Censure, afin d’évaluer si les Mémoires peuvent être à juste titre considérés comme une sorte d’achèvement de la critique de Huet.

Ce projet s’inscrit dans un projet plus vaste, mené en collaboration avec Alison Howell, qui vise à préparer une édition critique de la dispute Régis-Huet. Cette édition sera divisée en 4 volumes et comprendra, en plus de la Censure à la Réponse (éditée par Nausicaa Elena Milani),

  • la version française de la Censura philosophiae cartesianae (1689), à savoir la Censure de la philosophie de Descartes (éditée par N.E. Milani, transcription du manuscrit par Alison Howell), un ouvrage conservé sous forme de manuscrit à Bibliothèque Nationale de France (MF 14702) et composé de 55 feuillets en papier cartonné de dimension 235x135 mm,
  • la Réponse au livre qui a pour titre : Censura philosophiae cartesianae par Régis (1691) (éditée par N.E. Milani),
  • les Nouveaux mémoires pour servir à l’histoire du cartésianisme (1692) (éditée par N.E. Milani), qui complète la critique de Huet de la philosophie cartésienne exposée dans la Censura.
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